Warhammer 40 000 : Imperium sombre (Dark Imperium)

Dark Imperium est un roman sorti en 2017 avec une lourde tâche : introduire aux fans de l'univers les grands changements ayant eu lieu dans la galaxie au 41ème millénaire.

Pour saisir l'ampleur du défi, il faut avoir à l'esprit que depuis sa création à la fin des années 1980 et jusqu'à 2017, l'univers de Warhammer 40 000 n'avait pas vraiment avancé. Il a été étendu, par l'introduction de nouvelles factions ou sous-factions, tels les Tau ou les cultes génovores (Genestealer cults). Il a vu ses bases historiques renforcées via la série de romans de l'Hérésie d'Horus qui est venue détailler l'histoire de l'Imperium au 31ème millénaire et les évènements qui ont conduit la galaxie et l'humanité à se retrouver ainsi 10 000 ans plus tard. Il a été approfondi via des romans tels que les séries Eisenhorn ou Les fantômes de Gaunt qui permettent de mieux comprendre l'Imperium.

Mais jusqu'en 2017, il n'était présenté qu'une version stagnante de la galaxie, une humanité en déliquescence mais tenant bon et une absence d'évolution des rapports de force. Les manuels de jeu de la fin de la 7ème édition et la 8ème édition ont changé tout cela avec un bouleversement majeur : la résurrection du Primarque des Ultramarines, Roboute Guilliman après la destruction de la planète Cadia et l'ouverture de la faille de la Cicatrix Maledictum à travers la galaxie.

Dark Imperium a donc la lourde tâche de raconter ces évolutions qui viennent enfin faire avancer l'univers. Le roman commence par un flash-back quasiment 10 000 ans auparavant, racontant l'assaut de Roboute Guilliman contre le primarque-démon des Emperor's Children, Fulgrim. Un assaut qui se conclut par la blessure mortelle de Guilliman et le conduit à être figé en stase jusqu'à son récent réveil.

Le roman décrit ainsi le retour à la vie du primarque et les débuts de la croisade Indomitus que celui-ci lance à travers la galaxie pour repousser le Chaos et ré-unifier l'humanité. Mais assez rapidement, il se concentre sur un conflit particulier : celui qui oppose le Fils vengeur au primarque-démon de la Death Guard, Mortarion. Celui-ci fait en effet des ravages dans le royaume d'Ultramar, fief de Guilliman.

La narration est dans l'ensemble très réussie, à travers les points de vue de multiples personnages qui donnent un premier aperçu assez réussi des guerres de la peste. On suit ainsi le Primarque, mais aussi un soldat de la garde impériale confronté aux horreurs de Nurgle ou encore certains des serviteurs du dieu du Chaos.

Le livre a ainsi plusieurs mérites : il permet de comprendre une partie de l'état général de la Galaxie au 41ème millénaire et les relations politiques entre ses dirigeants (notamment le primarque mais aussi le maître de chapitre des Ultramarines, Marneus Calgar ou le tribun de l'Adeptus Custodes, Maldovar Colquan). Il donne aussi à voir la manière dont les rivalités entre démons sèment le désordre parmi les forces du Chaos, même entre ceux qui servent le même dieu de la pestilence. On y découvre aussi leur point de vue, la manière dont ils conçoivent leur action, et comment ils sont pour beaucoup convaincus de faire le bien et de rendre service aux hommes en propageant parmi eux la maladie. Enfin, le roman introduit le personnage de Mathieu, Apostolique-militant choisi par le Primarque. Il montre enfin la manière dont Guilliman interagit avec le facétieux Archimagos Belisarius Cawl de l'Adeptus Mechanicus, à qui il doit la création des Space Marines Primaris.

Les évènements s'enchaînent avec rythme et l'auteur suscite habilement la curiosité du lecteur tout en sachant garder une certaine dose de mystère. Pour un fan de cet univers, l'autre mérite de ce roman est de permette de suivre certains des personnages les plus puissants de l'Imperium de l'humanité, des gens plus grands que nature qui étaient plutôt les protagonistes de récits relatifs à des temps lointains. En dosant habilement leurs traits de caractère, ils parviennent à rester intéressant et attachants. Guilliman est presque parfait à tout point de vue, mais le livre donne à voir ses doutes vis à vis de lui-même et de la galaxie. Et sa vision plus rationaliste apporte un vrai vent d'air frais dans le marasme obscurantiste du 41ème millénaire, qui permet de lui donner du relief. Maldovar Colquan est pénible et désagréable, mais d'une rectitude morale intangible. Mathieu se révèle être un fanatique discret dont la volonté de faire changer d'avis le primarque amène régulièrement à des dialogues intéressants.

Après, je pense que ce roman est à recommander surtout aux gens ayant déjà une connaissance de base de l'univers Warhammer 40 000 et de ses enjeux. En effet, une bonne part de l'impact dramatique est lié au caractère exceptionnel de certains personnages, à leur passé et au contraste avec la stagnation morose de l'Imperium jusqu'ici. Ce n'est donc pas le meilleur roman pour débuter dans cet univers, mais c'est le premier tome d'une très bonne trilogie sur les guerres entre l'Imperium et Nurgle au 41ème millénaire.