Réflexions intérieures (Mini-fic sur Ianto)

Ianto était seul dans le Hub. Autrefois cette situation lui arrivait souvent et ne lui déplaisait pas. Il était l’homme à tout faire, le support de l’équipe. Il rangeait les bureaux, prenait soin des autres, leur apportant café et écoute s’ils le désiraient. Ce rôle lui convenait parfaitement, il n’avait jamais été très à l’aise avec les armes et l’action. Mais cette fois-ci, c’était différent. C’était la première fois qu’il se retrouvait seul depuis la mort de Toshiko et d’Owen. Il n’avait pas eu le temps de faire son deuil, Jack et Gwen non plus d’ailleurs… Trop peu de temps pour y penser… Trop d’action… Il n’en avait pas l’habitude…

Juste après la disparition brutale de ses coéquipiers, la Terre avait été « enlevée » par les Daleks et alignée avec d’autres planètes pour former une arme capable de désintégrer chaque atome vivant dans la galaxie et dans l’univers entier, ne laissant que les Daleks en seigneurs et maîtres absolus. Mais ce cauchemar avait été évité de justesse grâce aux actions combinées de l’équipe formée de Jack, du Docteur et de ses compagnons.

Ianto se perdit dans ses pensées :

« Ah, ce fameux Docteur… Un des rares hommes qui pouvait se mettre entre lui et Jack. Cet homme, pour lequel son beau capitaine n’avait pas hésité une seule seconde avant d’aller le rejoindre et de se lancer dans une aventure véritablement risquée et incertaine. Il l’avait déjà fait, un an auparavant. Jack s’était littéralement envolé du QG de Torchwood, sans prendre le temps de l’avertir, de les avertir. Il les avait laissés seuls, sans explications, sans un au revoir… Et tout ça pour quoi ? Jack ne lui avait jamais réellement révélé ce qui s’était passé durant sa disparition. La seule chose qu’il lui avait dit, était qu’il avait trouvé son docteur et qu’il lui avait donné des réponses à certaines de ses questions. Il avait ajouté que s’il n’était pas resté avec ce dernier, c’était qu’il s’était rendu compte que sa place était ici, avec eux, et qu’il était revenu pour « lui ». Il avait dit « lui » en le regardant, lui, Ianto. Mais Jack s’était rapidement repris pour dire qu’il était revenu pour « eux ». Mais il l’avait dit : il était revenu pour lui. Une bouffée de chaleur l’avait alors envahi, et une partie de sa rancune s’était estompée. Si on lui avait dit, il y a quelques années, qu’il tomberai amoureux d’un homme, qui plus est, immortel et venant du futur, il aurait éclaté de rire. Mais on ne commande pas à ses sentiments. C’est, et il aimait à le croire, le côté sombre de la personnalité de Jack qui l’avait attiré, au début. Cet homme qui semblait si sûr de lui, ironique et dragueur, qui savait tellement de choses sur tout et n’importe quoi, cachait au plus profond de lui une tristesse et une mélancolie incroyables. Jack avait vécu beaucoup de vies, trop peut-être, et toutes les personnes qu’il avait rencontrées, ces événements qu’il y avait vécus, le hantaient régulièrement. Et d’après ce qu’il en savait, ce n’était pas fini. Jack était immortel, il ne pouvait pas mourir, ni de maladie, ni d’une balle tirée à bout portant dans la tête, ni même par l’absorption de son essence vitale par Abbadon

C’est au cours de cet événement, dont il avait été un des instigateurs en acceptant de rouvrir la faille, qu’il avait réellement su qu’il avait des sentiments pour Jack. Vidé de la quasi totalité de sa force de vie, Jack avait mis beaucoup de temps à se remettre, des jours entiers à attendre, sans savoir. Il n’avait pas eu le courage de Gwen qui était restée nuits et jours à le veiller. Cela lui faisait trop mal de le voir ainsi étendu dans un tiroir ouvert de la morgue. Plus les jours passaient et plus son espoir diminuait. Il se sentait coupable de cette perte de confiance et il avait l’impression de l’abandonner. Quand Gwen était remonté,e accompagnée de Jack encore sonné mais bien vivant, il était à la fois fou de joie et tétanisé. Il était resté immobile, muet, fixant son capitaine. Jack s’était alors approché de lui et l’avait tendrement enlacé et embrassé. Ce baiser, il lui avait rendu sans aucune réticence ou retenue, bien au contraire. Ce que les autres pouvaient dire ou penser, il n’en avait rien à faire à cet instant précis.

Puis Jack était parti. Plusieurs mois plus tard, il apparaissait en pleine action, tuant le poisson globe que lui n’arrivait pas à tuer, il faisait maintenant partie entière de l’équipe depuis la disparition de Jack. A la fin de cette mission, Jack était rentré avec le reste de l’équipe au Hub, comme si de rien n’était, comme s’ils s’étaient vus la veille. Mais pour Ianto, son absence avait laissé une plaie béante dans son cœur et il n’était pas encore prêt à lui pardonner, à oublier. Il avait passé des nuits entières à chercher le sommeil, à se demander où il pouvait être, ce qu’il faisait, et surtout avec qui. Il restait donc distant.

Et puis, John Hart était arrivé par la faille. C’était un ancien coéquipier de Jack et d’après John, un ancien amant, bien que Jack ait réfuté cette information. Un douloureux sentiment de jalousie avait fait son apparition, ancrant encore plus la rancune qu’il avait envers Jack. Ce dernier avait un comportement bizarre lorsqu’il était en compagnie de John. Il ne lui faisait pas confiance, il le connaissait trop bien pour cela. Mais il accepta de l’aider, pour « refermer cette page de son passé ». Cela s’avéra être une erreur, au lieu de bombes, c’était autre chose que John cherchait et cela avait failli tuer Gwen. Durant cette mission, alors qu’ils fouillaient des bureaux à la recherche d’un des containers, Jack avait prit l’initiative de lui demander s’il allait bien, sachant pertinemment que ce n’était pas le cas. Il avait essayé de rester aussi distant que possible, mais, Jack avec son air charmeur auquel il ne pouvait résister, lui avait indirectement avoué ses sentiments et demandé de sortir avec lui, prétextant un moment de détente dans un café et un ciné pour finir la soirée. Il n’avait pu refuser et avait accepté l’invitation sur un air faussement détaché qui avait amusé son compagnon. Sa plaie s’était refermée.

Mais jamais ce rendez-vous n’avait jamais eu lieu, pas le temps, trop de chasse aux Weevils et autres aliens pour prendre un jour de repos. Ils avaient certes eu quelques moments furtifs de « communion » mais souvent écourtés par l’arrivée impromptue de leurs coéquipiers ou par le bruit de l’alarme retentissant dans le Hub . »

Sans s’en apercevoir, Ianto s’était dirigé vers le bureau de Jack et s’était appuyé sur le bord de la table, jonchée de papiers en tout genre, d’artéfacts aliens arrivés par la faille, en cours d’analyse, et de vieilles photographies. Le manteau de Jack était négligemment abandonné sur le dossier du fauteuil. Il se dit qu’il devrait y mettre de l’ordre et commença par prendre le manteau pour l’accrocher à la patère. Il arrivait à percevoir l’odeur de Jack mêlée de celle des Weevils qu’ils venaient de pourchasser et de quelques traces du parfum de Gwen que Jack avait pris dans ses bras après qu’elle eut chuté lors de la course-poursuite. Jack était d’ailleurs parti la reconduire chez elle, cela faisait bien dix minutes. Toujours perdu dans ses pensées, il fut interrompu par une voix :

- Tu n’es pas obligé de faire ça !

En se retournant il aperçut Jack, arrivé d’il ne savait où, vêtu d’un simple tee-shirt blanc et de son sempiternel pantalon années 40 dont les bretelles pendaient le long de ses cuisses. Il était adossé au chambranle de la porte, les bras croisés, un sourire au coin des lèvres et des étincelles dans les yeux.

- Ça me détend, lui répondit Ianto.
- Je connais d’autres moyens pour se détendre… bien plus intéressants à mon goût… proposa Jack.
- Intéressant !… Dois-je prendre le chronomètre ? Sieur ?