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 [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1

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Mat
Le Pharaon
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Mat


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MessageSujet: [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1   [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1 EmptyVen 29 Fév 2008 - 12:45

Règles du jeu by Skay-39:

Skay-39 a écrit:
Voici les sept règles à respecter :


Arrow Les nouveaux messages doivent être dans la continuité des précédents, et poursuivre l'histoire de façon cohérente. On est sur un forum de fanfic, alors on devrait y arriver... Jack
Arrow Il est tout à fait possible d'inventer de nouveaux éléments par rapport à la série, mais il faut en revanche veiller à ne pas entrer en contradiction avec celle-ci, pour faciliter la compréhension. :cam:
Arrow Prière de ne pas jeter à la corbeille tout ce qui à été dit précédemment avec des suites du genre "ils périrent tout dans une supernova" ou "il se réveilla en sursaut et comprit que tout ce qui s'était produit depuis le second post était un rêve". :ronon:
Arrow Lorsqu'un membre décide de prendre la suite, il doit poster un message pour le signaler, qu'il éditera par la suite ; ceci pour éviter que deux personnes poursuivent le récit à partir du même point. :daniel:
Arrow En cas de courte participation, prenez soin de citer les passages précédents auxquels vous faites référence dans votre narration, afin de faciliter la compréhension. :sheppard:
Arrow Si possible, essayez de poster au moins quelques lignes, histoire de faire progresser l'action un minimum... :weir:
Arrow Si vous souhaitez intégrer un commentaire à votre message, prenez soin de l'écrire dans une couleur différente. :wraith:



Aux environs des années terrestres 1700, planète Isirich 4


Seul, à la fenêtre taillée dans l'or blanc qui surplombait son royaume personnel, le baron Jardo Mollari, vêtu de sa riche boutonnière blanche, dorée et mauve, était une fois de plus occupé à admirer chaque forme, chaque ton lumineux, chaque couleur, chaque sensation et chaque souffle de vie qui émanait de la surface riante de la planète. Comme tout bon Centauri lyrique et passionné.

Revendiquée et colonisée par le Lion de la Galaxie près de 150 ans auparavant, Isirich 4 donnait le spectacle d'une flore épurée, immense et adaptée aux climats chauds. D'un vert clair et brillant, chacun de ces arbres autochtones était parsemé de ces curieux reflets cristallins étincellants, qui faisaient scintiller les jungles vertes et tièdes comme sous l'effet de milliards de paillettes naturelles.

Là où l'on aurait pu trouver de l'herbe sur Terre, le sol de ce monde sans lune était couvert de mousse beige au toucher sec et sablonneux; un sol sans cesse tourné et retourné par les esclaves Drazi à la recherche des métaux et autres minéraux, à valeur financière, militaire ou scientifique, autour desquels s'articulait la gloire infinie de la Grande République Centaurie. Ha, la planète Centauri Prime et son royaume sans frontière! L'empire multistellaire qui dictait sa loi à un quart de la surface de la galaxie et à tant d'espèces conscientes colonisées! Jardo Mollari, baron de la seigneurie d'Isirich, était l'un des maillons aussi courageux qu'anonymes formant l'infatiguable chaîne de feu et de roc. Qu'était-il, lui, seigneur provincial, face à l'Empereur et à ses Imperators? Difficile, pourtant, ne pas flatter un certain ego face à la beauté de son domaine indubitablement unique.

Son palais, une pyramide cernée de deux homologues plus petites, était tout en angles largement arrondis. D'une couleur mauve métallisé et strié de sigles gigantesques de couleur or, il lévitait en silence dans le ciel azur scintillant de nuages dorés, sans mouvement ni émanation aucune. Le château aérien flottait au dessus du camp sommaire depuis lequel les esclaves et leurs gardes exploitaient les mines creusées dans le secteur. Les sujets en arme du baron portaient leurs gilets de protection rouges et leurs pantalons de terrain de la même couleur, et arboraient leurs casques et leurs fusils énergétiques au coloris doré. Mais de telles tenues n'adoucissaient pas, aux yeux des malheureux Drazis exploités, la rudesse de leur mission. Les Homme-Lézards à la peau grise et écailleuse continuaient à suer sans fin face à leurs geoliers au visage Humain.

Tandis qu'une paire de chasseurs Centauri traversait le ciel en escortant un dirigeable violet, Jardo gratta le long nez pointu qui saillait au milieu de son visage sec, caressa sa longue moustache gracieuse puis remit coquettement en place les pointes de son singulier éventail capilaire de couleur blond paille, qui encadrait verticalement son crâne.

-Baron?

Mollari fit lentement volte face pour découvrir son cher régent, un Centauri métropolitain beaucoup plus vieux que lui, refusant avec dignité de cacher le crâne chauve en dessous duquel apparaissaient les traits fatigués et abîmés d'une longue existence de loyauté; pour la plus grande gloire du Lion!

-Oui, ami Godar, approches, répondit le baron de sa voix la plus débonnaire et avec un fort accent provincial, sans cesser de lisser sa moustache entre le pouce et l'index. Qu'as-tu à m'annoncer? Reprit-il.
-Les esclaves ont effectivement mis quelque chose à jour dans le secteur huit de la province, là où notre senceur avait détecté une irrégularité géologique.

Jardo Mollari, le poète, l'aventurier et l'éternel jeune fou, sentit sa curiosité piquée au vif.
-S'agirait-il de quelque chose d'artificiel? D'avant nous?
-C'est une dalle, baron, reprit le vieil homme. Une dalle de pierre, lourde et taillée, sculptée en cercle. De toute évidence, elle est le... bouchon placé pour clore ou comprimer quelque chose.
-Quelles informations avez-vous déjà pu tirer?
-La certitude de faire face à des architectes méconnus de notre République, répondit le sujet sans s'autoriser à regarder une seconde la baron dans les yeux. Notre chef de chantier subodore une cavité rigide... gorgée jusqu'à son extrême limite de millions de petits objets inanimés, faits de minéraux précieux.

Le baron écarta les bras dans une mimique évidemment interrogative.
-Des formes trop répétitives et complexes pour être le fruit de la nature, ajouta avec joie le gérant fatigué.
-Un trésor...
-Oui, baron, c'est très exacement ainsi que nous l'avons compris.
-Alors, désincarcerez la dalle, ordonna le seigneur Centauri sans davantage de précaution ni analyse.

Une fois encore, le flou procédurier du fougueux et passionné empire féodal avait frappé de son arbitraire et capricieuse imprudence.

Peu de temps après, à quelques kilomètres du chateau lévitant, les esclaves Drazi en guenilles qui faisaient cercle autour de la dalle considerèrent l'artefact finement ouvragé: deux colosses Drazi étendus là l'un en dessous de l'autre n'auraient clairement pas dépassé de la surface minérale froide, parfaitement circulaire, où était taillée cette inquiétante spirale en relief parsemée de figures géométriques tout en paradoxes visuels. Quelques visages stylisés et dramatiquement expressifs semblaient tenter en vain de s'en extirper.


Le soir


à peine capable ne serait-ce que de relever la tête, le fantassin Centauri sentit le filet de sang finir de dévaler sa tempe pour joindre d'un coup la comissure de ses lèvres. à travers ses yeux vitreux, il observa les incendies titanesques qui avaient embrasés les jungles vertes aux reflets d'or.
Devant la carcasse méconnaissable du palais provincial qui s'était loudement affaissé au sol, les plus si implacables machines de guerre Centauri erraient, à la recherche d'une cible qui ne serait pas tout à fait vaine au milieu des innombrables essaims tueurs et aveuglants qui slalowmaient entre eux.

Les deux tripodes Centauri dansaient sur place entre leurs trois longues jambes mécaniques dorées. Leurs têtes respectives bâties sur le même modèle, une épaisse soucoupe d'or en hauteur flanquée sur le dessus d'une demi-sphère de cristal vert comme le cerveau découvert sur le crâne d'un scalpé, semblaient scanner l'alentour avec l'énergie du désespoir. Les longs cables toniques des tripodes virevoltaient en tout sens, ardant furieusement de leurs rayons de feu dans toutes les directions... mais avec pour seul résultat d'aggraver les incendies qui possèdaient la jungle.

Entre les deux tripodes, la gigantesque araignée mécanique au blindage gris et aux six pattes titanesques en était pratiquement réduite à tourner sur elle-même, comme encerclée. A l'avant de son énorme corps métallique couvert de canons, la tête oblonge pivotante aux angles cubiques, servant de cokpit, habritait des pilotes et des artilleurs aussi terrorisés que sans espoir.

Le ciel nocturne se trouvait ce soir-là illuminé de la plus singulière des façons; des nuages mouvants, à la texture semblable à celle d'une masse d'eau en apesanteur et à la luminosité rappelant celle de l'or en fusion, se contorsionnaient sans cesse à quelques dizaines de mètres du sol, illuminant la nuit de milliers de reflets brillants. Entre eux se faisaient et se défaisaient de grands arcs lumineux tantôt lisses et fluctuants comme des jets d'eau à différentes pressions, tantôt torturés et sectionnés comme des éclairs.

à nouveau, les canons énergétiques de l'araignée de guerre Centaurie firent feu contre l'un des nuages de lumière liquide. Sous l'impact, celui-ci éclata comme un feu d'artifice, en une galaxie de particules scintillantes et mouvantes.
Le nuage effiloché se reconstitua du plus gros de sa masse, et à la vitesse de la foudre, des arcs lumineux en jaillirent pour aller cribler les deux tripodes malheureux. Comme tranchés de part en part par la mitraille lumineuse qui saturait l'air, les machines de guerre fumantes des Centauris s'effondrèrent sur elles-mêmes, leurs pièces mécaniques brisées et fondues se désolidarisant les unes des autres.

Le soldat mourant qui avait observé la scène tourna la tête, du côté de l'araignée qui parvenait encore à tenir les orages de lumière à distance grâce à sa propre puissance de feu. Pour combien de temps encore? Le fantassin eut sa réponse en apercevant ce qu'il prit d'abord pour des hologrammes ou des allucinations se diriger vers l'engin. Silhouettes humanoïdes flottantes, très féminines, ces spectres étaient d'une couleur turquoise vaporeuse et luminescente, et l'observateur Centauri eut l'impression de contempler de la lumière pure, quelque part entre l'état liquide et l'état gazeux!

Visages fins, certains pourvus de grands yeux rouges inexpressifs, et d'autres sans yeux ni même orbites, chevelures évanescentes volant lentement derrière elles, les dames de lumière liquide semblaient porter de longues robes fantômatiques, de même couleur turquoise qu'elles-mêmes et se mêlant à leurs "organismes" propres. Ces fantômes flottant dans l'air n'étaient pas dénués d'une certaine beauté froide et intimidante... comme fatale. Outre cela, chaque apparition portait autour d'elle de six à neuf petits globes irréels, aux multiples couleurs criardes et acidulées, gravitant arnachiquement autour de leurs silhouettes.

Lorsque les dames funestes encerclèrent la titanesque araignée Centaurie, un tourbillon de lumière tamisée encercla l'appareil, générant avec lui une tornade d'intensité remarquable mais restreinte en taille.

Le centauri se retourna tant bien que mal après avoir perçu un grincement. Dans son dos, se tenait un automate de guerre Centauri, lui aussi porteur de cette couleur or que les Centauris affectionnaient tant, avec le rose, le violet et le mauve.
Le colosse était fait d'un tronc solide au poitrail blindé couvert de pistons métalliques, et de quatre membres sommairement articulés, épais comme des poutres; dont un bras terminé par une pince, et un autre par un canon intimidant. Sur la grosse tête sans cou ni yeux ni visage du robot poussif et épais, le dôme transparent laissait entrevoir quelques uns des engrenages et autres étranges diodes de son cerveau mécanique tellement archaïque.
-Tu dois certainement être le dernier automate sur cette planète qui ne soit pas en pièces détachées, chuchota le Centauri pour lui-même, touché par la désinvolture que lui inspirait la certitude de sa mort imminente.

Un autre bruit le fit se retourner à nouveau, pour découvrir l'élégante créature qui était tapie contre le sol. Etait-ce un être vivant? Un robot? Impossible à déterminer. Il ne s'agissait rien moins que d'un énorme crabe de quartz et de cristal, gros comme un chien terrestre de bonne taille. Son corps apparant se composait en tout et pour tout d'un diamant bleu massif, d'aspect pur et taillé, aux facettes lisses et resplendissantes. Sans aucun autre signe distinctif de surcroît. Sur chacun de ses deux côtés les plus longs, perçaient trois pattes épurées et cristallines, six en tout. Le Centauri eut beau observer, il ne parvint pas à assimiler le système d'articulation de ces pattes minérales rappelant celles des insectes. Enfin, au niveau de sa supposée tête, surgissait une paire d'énormes pinces grinçantes et pierreuses.

La créature -vivante? Télécommandée? Irréelle?- se redressa de tout son possible sur ses pattes solides et élégantes, et fit claquer ses lourdes pinces de roc vers la nuit étoilée.
Le soldat aurait-il dû être terrifié? Certainement, s'il ne sentait pas la vie s'écouler doucement hors de lui depuis une demi-journée maintenant que la guerre faisait rage contre les innombrables nuées de cristaux vivants -rampants ou aériens- , ou encore d'agrégats spectraux de lumière liquide, qui avaient entrepris l'anéantissement total de tout ce qu'il y avait de non autochtone sur Isirich 4.

Le garçon fut tout de même surpris par les détonations, lorsque l'automate militaire Centauri braqua son canon contre le crabe cristallin et fit feu en série. La première charge de plasma rougeoyant fit reculer le crâbe, qui sembla l'absorber tout en emettant une aveuglante lumière bleutée. Il y en eu une seconde décharge, puis une troisième, et la "chose" explosa.

Pendant quelques secondes, le silence (relatif, au milieu des batailles et des incendies) fut roi, jusqu'à ce que les innombrables fragments de la créature, comme tous aimantés les uns aux autres, ne re réaglomèrent pour reformer, sous les yeux ébahi du fantassin, un crabe parfait. Pas pour longtemps, toutefois; un énième tir de l'automate le fit à nouveau voler en dizaines d'éclats et cette fois-ci, il ne se reconstitua pas.

L'attente ne fut pas longue. Après cela, un concert de cliquetis cristallins sans cesse plus vif se fit entendre, et l'automate se retournant, il perçut deux autres crabes qui lui faisaient face. Avant de pouvoir faire feu à nouveau, une cascade de petits cristaux mauves et tranchants furent comme vomis depuis la face ventrale des créatures, et la nuée colorée d'aiguillons acérés vint percuter l'automate à une vitesse folle. Les quartz mauves filaient, frappaient et refrappaient s'ils le pouvaient encore, zigzaguant autour du robot pour choisir leurs points d'impact. Une fois tous les coups qu'ils pouvaient donner distribués, ils s'achevaient automatiquement en une petite détonation qui semblait dispenser de l'acide corrosif et brûlant.

Lorsque tous les quartzs eurent fini d'éclater contre l'être artificiel conçu par la science Centaurie, il n'en restait plus qu'un monceau désarticulé et bouillant de tôle carbonisée et d'engrenages déboîtés.

Trop faible et nauséeux pour se demander si les crabes allaient maintenant s'occuper de lui, le mourrant leva les yeux au ciel pour découvrir que l'un des nuages d'or le surplombait désormais. D'ici, il pouvait distinguer les milliers de particules qui le composaient: de petits pieux cristallins et volants, lumineux comme des ampoules. Plus insolite encore, chacun d'eux était pourvu d'une paire d'ailes évoquant celles des libéllules ou encore des fées de légende.

Vol rapide et serré, lisse ou saccadé, surplace ou vol plané, rien ne semblait en dehors de leurs possibilités.


Dernière édition par Mat Vador le Ven 11 Juin 2010 - 17:13, édité 3 fois
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MessageSujet: [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1   [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1 EmptySam 6 Sep 2008 - 4:15

L'une des créatures vint virevolter silencieusment devant la face de l'homme, passant d'un bout à l'autre de son visage en une miliseconde. Il eût le temps de s'en trouver hypnotisé, avant que l'aiguillon lumineux aux ailes d'insecte ne fonce sèchement dans sa poitrine et ne le traverse de part en part, puis retourne à sa nuée comme si rien ne s'était produit.

Dans le ciel noir et étoilé, de titanesques cylindres à la texture quartzeuse et à l'aspect non technologique, rendu étincellants par le soleil invisible qui reflétait sa lumière sur eux comme sur la Lune vue depuis la Terre, s'élevèrent doucement vers l'orbite et l'espace.


Année Terrestre 2263, quadrant de la nébuleuse d'Orion

Une profonde blessure de feu s'ouvrit contre la poupe de la petite fusée de combat Drazie, irradiant l'espace, et mua soudainement le vaisseau tout entier en une larme de plasma fugitive dans le cosmos glacé.

-Leader à Titan, nous avons pris les derniers en tenaille, informa le pilote de chasse Terrien par radios interposées.
-Feu à volonté, lieutenant, répondit sur les ondes l'officier supérieur, comme à travers un voile invisible.
-Captain, la plupart d'entre eux n'auront plus assez d'énergie pour répliquer et même voler dans les minutes à venir... ils sont épuisés depuis des heures, nous pourrions...
-Onze familles ont été outragées et assassinées pendant le sac de cet avion spatial, lieutenant, coupa l'officier. Abattez-les, ou je viendrai le faire moi-même.
- ... à vos ordres.

Depuis la baie principale de son centre de commandement, le captain Ivanova suivait sans laisser transparaître d'émotions la marche mortelle de ses chasseurs en aile X et au nez allongé, les starfurys thunderbolt. Désormais, deux escadres cosmiques encerclaient la dernière formation ennemie, à court de carburant et de batterie pour la majorité de ses éléments.

Le gang pirate était de loin l'un des plus notables que Susan ait rencontré tout au long de la longue traque qui lui avait servie d'existence. Bien que sa nature de prototype le rende un peu moins puissant et perfectionné que ses petits frères, son vaisseau de combat Warlock, le Titan, avait dû pulvériser trois petites stations spatiales de combat Narn en orbite, réduire en cendres plusieurs battlewagons et un moyen porteur Drazi, puis bombarder la forteresse à moitié souterraine depuis le ciel avant d'en arriver là.

Les derniers chasseurs ennemis étaient maintenant acculés dans le vide, contraints sans échappatoire possible à subir d'une seconde à l'autre les conséquences de leurs actes. Il y avait là une majorité d'ailes triangulaires jaunâtres, les Zéphyrs; quelques vieux starfurys aurora, les ailes X au cockpit vertical plat, et enfin une poignée de ces chasseurs Narn à la peinture verdâtre, longs, plats et rectangulaires si l'on exceptait leurs canons à particules braqués vers l'avant et les griffes métalliques encadrant le cockpit trapu.

Ivanova avait déjà eu l'occasion d'éprouver la difficulté d'une guerre où l'ennemi avait aussi des raisons recevables de combattre et de tuer; mais ici, avec ce gang cupide responsable du massacre gratuit de tant de voyageurs malheureux, elle en était arrivée au stade du franc plaisir vengeur et meurtrier.

Susan Ivanova n'était plus la jeune fille douce et sensible de sa -très- lointaine jeunesse. Elle avait fait des guerres, elle avait tué, elle avait éprouvé la haine. Le camp adverse lui avait pris deux amours, Talia et Marcus, trois si elle se souvenait de la façon dont sa mère était partie; elle n'avait plus de famille; son vieil ami Garibaldi était à ce jour peu enclin à lui adresser la parole étant donné les termes de leur dernière interaction; Sinclair et G'Kar étaient partis, et Franklin, Sheridan et Delenn n'avaient plus de temps pour elle.

Aussi, à l'heure où l'Alliance Terrienne était redevenue conforme à la morale qu'elle louait, -si l'on exceptait le Corps Psy d'ailleurs aux prises avec sa guerre des télépathes rebelles, dont l'Earth Force et l'Earth Dome se déchargaient curieusement- Susan Ivanova avait accepté le destin qui semblait lui être taillé sur mesure: traquer et assassiner les ennemis de la Terre, en bonne et dûe forme. Aller d'une mission à l'autre sans réfléchir, et surtout ne jamais s'arrêter ne serait-ce que la plus petite seconde; car c'était dans l'inaction que resurgissait l'odieuse souffrance de la conscience d'elle-même, des autres, de son histoire, du monde. Ainsi, pour survivre, Ivanova avait-elle dû accepter de devenir son propre démon. Puisqu'il lui fallait à tout prix épancher la folie destructrice découlant de sa triste et insatiable colère, on lui donnait l'occasion de le faire à l'encontre des ennemis de la loi, des tueurs de citoyens.

Cette année 2263, Susan Ivanova ne craignait plus grand chose. Elle incarnait désormais au plus profond de sa nature les émotions par lesquelles elle avait souffert par le passé. Dans son puits d'obscurité, Susan Ivanova était captain du Warlock Titan, et sa mission était de liquider pirates, envahisseurs, barbares, terroristes et autres antagonistes actifs de la morale de l'Alliance... sa morale. Des massacres, disaient certains, des actions douloureuses mais nécessaires, rétorquaient d'autres. Et les résultats d'Ivanova avaient tantôt ravi, tantôt effrayé à Genève, capitale de l'Alliance Terrienne, et à Tuzenor, capitale de l'Alliance Interstellaire, tant le carnage méthodique et suivi dans les rangs des pirates pris au piège au cours de cette dernière campagne avait de loin pulvérisé le seuil de la décence publique.

Loin d'ISN, loin du coeur, se plaisait à rétorquer le captain controversé. Les régions habitées du quadrant d'Orion formaient un petit ruban de plusieurs systèmes stellaires sans pratiquement aucune planète ou lune à l'environnement biologiquement acceptable d'un point de vue Humain. Il y avait été implanté, sous dômes de vie, stations orbitales et structures pressurisées au sol, de nombreux astroports, forteresses pirates, stations minières, docks sidéraux, complexes agricoles et autres flottes nomades tenus par des Humains débrouillards et autogérés; et de l'anarchie primordiale, la majorité de la zone avait été par la suite alignée sous la bannière de la Coopérative d'Orion, petit état Humain indépendant de la Terre, il y avait plus de dix ans de cela. Malgré quelques années de guérilla entre la grande et la petite faction Humaine, dues principalement à la volonté Terrienne récurrente de régenter cette communauté de congénères voisins, la paix avait été scellée fin 2257. Aujourd'hui, la Coopérative possédait sept systèmes (dont un, rarissime, ne contenant qu'une petite étoile, une gazeuse et ses lunes, puis un superterre) , plus la planète-colonie Orion 7, rétrocédée par l'Alliance Terrienne lors de la chute de la Night Watch, car la colonie avait proclamé son indépendance vis-à-vis de la politique dictatoriale du moment. Depuis les guerres de Babylon 5, les Orians étaient progressivement devenus de bons partenaires des Terriens, en aidant à défendre la grande station de la paix contre une attaque alien, en combattant le régime du président-dictateur Clark, puis en adhérant à l'ISA, dite Alliance Interstellaire ou Galactique. Mais à ce jour, une poignée de gangs du côté des Limbes, les plus violents, immoraux et incontrôlables, était demeurée récalcitrante aux Conféderés, et c'était pour achever le travail civilisateur des Orians que Susan était sur place. Qu'importe qu'ici il y ait eu des milliers de morts sous son commandement, Ivanova n'avait pas fait de prisonniers car l'occasion ne se présentait pas. Disait-elle.

De surcroît, les Renseignements lui avaient fait savoir que nombre de criminels de guerre de l'Earth Force, du parti politique de Clark, de la Night Watch, du Home Guard, du Corps Psy, et de différentes administrations locales ou fédérales, s'étaient réfugié dans le coin, offrant leurs informations, leurs contacts et leurs services de conseillers tactiques aux Raiders. Le rêve de Susan était de capturer et exécuter le plus "lourd" d'entre eux, Wilson, l'admiral qui avait avait servi sous Clark après la défection et la mort de Hague, et qui avait personnellement donné son feu vert aux plus infâmes exactions contre des populations civiles de l'Alliance.

Perdue dans ses pensées, Susan suivit à peine la fin de l'opération Tsunami dans ce secteur. Les ailes X Thunderbolt, illuminées par l'éclat du soleil local sur leurs coques, dardèrent en rafale de leurs canons à particules; les torrents de flux énergétiques vinrent percer les coques et détruire les appareillages, provoquant l'explosion en chaîne des chasseurs pirates qui se percutaient les uns les autres sous l'inertie des tirs.

Pendant de très longues secondes, une pluie d'énergie convergea en cercle vers le même périmètre; puis, lorsque tout fut fini, les dizaines de débris calcinés et passifs dérivèrent en tout sens.

-Les pilotes peuvent rentrer à la base, annonça Ivanova en un souffle.
Elle savait que plusieurs de ces pilotes la détestaient. Le captain n'avait jamais outrepassé la frontière marquée par le meurtre d'un adversaire désarmé ou blessé, ayant présenté sa reddition ou se révélant très facilement capturable. Mais en ordonnant que l'on fasse feu à volonté sur un ennemi à bout, encerclé, inférieur en nombre et en équipement, et à quelques minutes de tomber en panne sèche, plusieurs pensaient qu'elle trichait pour contourner le règlement, trahissant de facto l'éthique militaire. Maintenir la pression quelques minutes de plus aurait suffit à constituer prisonniers la plupart des flibustiers au lieu de tous les descendre immédiatement... Plusieurs pilotes n'acceptaient pas vraiment qu'autrui salisse ainsi leurs propre mains, et en dormaient mal, mais demeuraient silencieux.
Ivanova leur aurait juste répondu qu'après tout, une destruction surprise et instantanée n'était-elle pas plus charitable que la trop lente exécution par décompression dans le vide sidéral, suivant généralement le long procès anxiogène de ce genre de canaille?

-Un canal tachyonique ouvert pour vous depuis la Terre, captain, informa timidement un jeune officier de pont assis derrière son pupitre de commande.
-Bien, répondit la brune d'une voix absente. Transférez-le.

Le capitaine vint se rasseoir sur son fauteuil pivotant, et fixa sans sciller l'écran plat où apparut le faciès mi Africain, mi Asiatique du général Musa.
-Bien le bonjour, captain Ivanova. Comment se déroule votre campagne?
-Mon général, commença-t-elle en inclinant brièvement la tête. Nous avons perdu très peu de pilotes, même si déjà trop, en échange de l'anéantissement total d'une douzaine de grosses structures Pirates. Stations spatiales de combat, bunkers et forteresses, sans compter les vaisseaux de chasse et les moyens porteurs. Quant au Titan, il est pour ainsi dire intact. Encore quelques patrouilles de notre part, et je doute que les Confédérés Orians du coin entendent encore beaucoup parler de ces pillards d'ici quelques années, monsieur, acheva Ivanova sur un ton qui devait tutoyer le concept du zéro absolu.
-Justement, captain. Je vous contacte à ce propos. Nous ferons court, il est temps d'ajourner votre mission ici, vous êtes attendue ailleurs avec votre bâtiment.
-Monsieur, je... débuta l'officier qui montrait déjà les dents.
-Pas de discussion, captain, coupa strictement Musa en insistant sur le grade de la Russe. Les Raiders attendront. L'Alliance Interstellaire a besoin de vous pour une autre mission.
-Qui est...?
-Isirich 4, colonie Centaurie du temps de l'Empire de l'Univers, perdue il y a environ cinq-cent-soixante ans de ça. Un message reçu par l'empereur depuis cette planète à l'époque annonçait l'éradication de la colonie et de sa population, puis disait de ne revenir à Isirich 4 sous aucun prétexte, d'oublier jusqu'à son existence. Entre la disparition de la colonie et de sa garnison, la disparition de la puissante escadre de secours qui suivit, et la superstition des Centauris, ils finirent par suivre la consigne. Mais il y a quelques jours, Centauri Prime a reçu un signal de détresse venu d'Isirich 4. L'Empereur Mollari II souhaite tirer l'affaire au clair tout en subodorant un piège.
-En quoi la volonté du vieux fou devrait concerner le Titan? Londo a choisi et revendiqué l'isolationnisme, si je ne m'abuse.
-La politique, Susan. Le président de la galaxie considère que ce geste pourrait aider à un rapprochement salutaire. Les Centauris sont les Prussiens de notre univers. Tous les vingt ans, une petite guerre et ça repart... Sheridan souhaite retarder au maximum l'échéance. Et s'il nous a parut approprié de proposer notre aide dans ce cas présent, c'est parce qu'en réalité l'affaire elle-même nous concerne tout à fait : Isirich 4 est dans un cône d'espace non revendiqué comprimé entre le Freehold Drazi, les anciennes marches de feu le Régime Narn, qui concernent toujours la Nouvelle Nation Narn à un degré moindre, puis la Coopérative d'Orion, la République Centaurie et... nous, captain. L'une de nos bases militaires les plus importantes en dehors de notre espace mère n'est qu'à quelques heures d'hyperespace d'Isirich 4. Autant dire que s'il y a là-bas quelque chose qui n'a fait aucun survivant parmi une colonie Centaurie, sa défense locale et l'armada de secours, eût égard à la robustesse et à la puissance de feu réputées de l'astronautique Centaurie de l'ère Or-Empire, nous devons nous tenir au courant. Il s'agit moins d'aider les Centauris que de nous impliquer furtivement dans un dossier qui nous concerne réellement.
-L'ordre de mission?
-Rejoignez la lisière du système Isirich, capitaine. Vous y serez rejoint par une escadre Oriane, une autre Drazie, une autre Narn, et surtout par le Perle de Glace, un primus Centau...
-Quoi!?
-Paix, captain, coupa Musa.
-Quelqu'un se rappelle-t-il encore que l'ISA -incluant la Terre- et les Centauris se sont fait la guerre l'année dernière?
-En fonction de quoi nous devons nous focaliser sur le passé et ne plus jamais tenter d'avancer, captain?
-Facile à dire quand on n'a pas à collaborer avec un croiseur spatial Centauri... si vous voulez bien m'excuser, général. Combien de vaisseaux des Alliés l'équipage du Perle de Glace a-t-il détruit? Comment dois-je gérer la rencontre entre des Centauris d'un côté et des Narns et Drazis de l'autre, avec tout ce qui s'est passé entre eux cette dernière génération? Alors que les Centauris sous Cartagia ont anéanti l'ex Régime Narn, annexé des secteurs du Freehold? Alors que les Narns ont tué tous ces marchands Centauris, et les Centauris des centaines d'astronautes Drazis? Et alors que Narns et Centauris viennent tout juste d'anéantir mutuellement la planète mère de l'autre? C'était il y a un an! ça va dégénérer!
-Ecoutez, Susan... en 61, il y avait des vaisseaux Narns et Centauris ensemble dans la coalition anti-Clark, alors qu'ils sortaient d'une guerre abominable et déshonorante. Les Terriens ont fait la connaissance des Centauris à l'époque où le déclin géopolitique les avaient rendu charmants. Un siècle durant, ils ont été nos plus proches amis et alliés, alors que le Régime Narn était notre bête noire. Aujourd'hui, la situation est très exactement l'inverse d'au commencement... mais le président Sheridan semble considérer que la présence de Mollari II sur le trône de Centauri Prime est une bonne chance de voir un jour nos anciens amis sortir de leur complexe impérialiste. La mutation des vestiges du Régime Narn en une nation mesurée, éthique et amicale aurait eu des airs de politique-fiction totalement grotesque, encore début 59. Son exemple doit donc nous éclairer et nous inspirer l'espoir. On a rien sans rien, Susan. On ne peut espérer un avenir meilleur si on reste bras ballants aujourd'hui.
-On repassera pour le cours de philo, mon général. Autre chose?
-D'une, je vous saurai gré de me parler comme il se doit; votre héroïsme pendant les guerres de Babylon 5 et votre... efficacité actuelle avec les Pirates ne vous autorise pas encore à me dédaigner. De deux, oui, il y a un autre facteur.
Voyant que Susan ne commentait pas, il poursuivit.


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MessageSujet: Re: [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1   [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1 EmptySam 6 Sep 2008 - 4:15

-La fin de votre ordre de mission est le suivant: vous coordonner avec l'escadre internationale pour établir un rapport de la situation sur Isirich 4. état, population, menaces. Pas d'acte de guerre de notre part sans agression préalable par un tiers, inutile de le dire... Et l'autre facteur, c'est que le dernier baron de la planète avant sa perte était un Mollari, Susan. Un ancêtre de l'actuel empereur. La planète Centaurie la plus proche du système Isirich est d'ailleurs encore un fief de la maison Mollari aujourd'hui.
-En clair...
-Nous traversons un champ de mines, captain. Sous-pesez bien les informations que vous pourriez découvrir là-bas avant de les partager avec l'imperator Centauri qui vous épaulera, car lorsqu'il est question de l'honneur de la Maison Royale, les Centauris commencent à avoir la main lourde sur le poison.
Susan jura en russe à mi-voix.
-Captain?
-Ordre de mission bien intégré, mon général. Nous partons dés les coordonnées téléchargées.

Dans l'espace, le nez du vaisseau qui flottait au milieu des débris mécaniques et organiques se leva, et le Warlock Titan disparut, impassible, dans un éphémère tourbillon bleu brillant.

[SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1 Eawarlock

à vous!


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MessageSujet: Re: [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1   [SPOILER POST SAISON 5] Vorlon Exquis # 1 EmptyJeu 25 Sep 2008 - 1:07

A la surface d'un monde lointain depuis longtemps abandonné, la nature avait reprit ses droits sur l’invasion de la civilisation. La mousse beige et rêche avait eut tout le temps de faire disparaitre les empreintes des engins Centauris, tripodes et excavatrices, et masquer les efforts des esclaves Drazi pour arracher à la planète ses minéraux précieux. Elle recouvrait tout : ossements et uniformes, cratères et carcasses de véhicules enfouis. Seuls les îlots de fougère d’un pâle bleu-vert permettaient de distinguer vaguement, ici un crâne d’aspect presque humain, là une main squelettique crispée sur une arme de poing encore opérationnelle.
Au cœur de la jungle d’un vert presque douloureux pour les yeux, on distinguait encore les traces d’une ancienne clairière. Les arbres y étaient plus jeunes, et avaient pour certains pris racine sur les souches de leurs ancêtres trente fois centenaires ; mais en vérité, le doyen ici n’avait pas plus de cinq cents cinquante ans.
Au centre de l’éclaircie autrefois pratiquée par les ouvriers asservis, s’ouvrait une excavation, dont on ne devinait le caractère artificiel que par la présence du haut tas de terre couvert de mousse à côté. Tout au fond béait la gueule d’un large puit circulaire, d’un diamètre avoisinant les quatre mètres et aux profondeurs si sombres qu’on ne pouvait les mesurer. Les parois minérales rouges et lisses témoignaient d’un travail soigneux.
Une sorte de marche circulaire d’environ un mètre de large descendait sous le bord supérieur du puit. Elle semblait conçue pour supporter quelque chose d’un peu plus grand que le cylindre de vide, une sorte de couvercle.
C’était le cas, bien sûr. Le couvercle en question reposait à quelques dizaines de mètres de là, au pied d’un grand arbre au tronc marqué de mauve, presque entièrement enfoui dans la mousse sablonneuse qui masquait ses presque deux mètres d’épaisseur ; au point qu’on ne distinguait guère plus que sa surface délicatement gravée. C’était le seul élément non végétal que la mousse n’avait pas colonisé.
Un infime craquement se fit soudain entendre. C’était un son hors de portée d’une oreille humaine, à peine perceptible par un faucon à l’ouïe aiguisée. Le bruit qu’auraient pu produire les mandibules d’une chenille attaquant l’intérieur d’une noix. En réponse, l’immense dalle de pierre se fendilla un peu. Une fêlure minuscule, invisible à l’œil nu et longue d’à peine quelques centimètres. Mais rapidement, elle se fit plus longue, plus profonde. Dans un nouveau craquement que nul cette fois n’aurait pu prétendre ignorer, elle courut sur un mètre tout entier. Puis elle se divisa en deux, et encore en deux, et une nouvelle faille coupa soudain la première en son centre.
Les fissures s’étendaient par à coup, comme suivant les impulsions de quelques vers souterrains. D’abord esquissées, presque imperceptibles, elles s’affirmèrent rapidement, dessinant à la surface par ailleurs absolument intacte de la dalle circulaire une arborescence de plus en plus arrogante. Bien que les lézardes en éclairs courent maintenant sur tout le disque de pierre rousse, leur entortillement était nettement plus fourni en son centre, ou un nouveau phénomène était en train de se produire.
Le disque perdait de son uniformité. Un dessin en toile d’araignée était en train d’apparaître à sa surface, tandis qu’une série de cercles concentriques se matérialisaient peu à peu, sous l’apparente poussée de quelque force intérieure. Lorsque les cercles gagnèrent encore en présence, ruinant définitivement le motif gravé, l’ensemble commença à évoquer plutôt une cible, dont le centre était le théâtre d’un évènement plus étonnant encore.
Sur environ un mètre de diamètre, un cercle de pierre très approximatif était en train de se soulever, à grand renfort de craquements et de grincements. Il en advint de même pour l’anneau morcelé qui l’encerclait, et pour celui qui le ceignait à son tour.
On aurait pu s’attendre à constater rapidement les effets d’une quelconque pression sous-jacente – sifflement du gaz qui s’évade, jaillissement de poussière ou de liquide… Mais ce fut l’inverse qui s’observa : avec un son bas et grave de très profonde inspiration, un peu de la fine poussière qui commençait à se répandre dans l’air au-dessus de la dalle fut happés à l’intérieur de la dalle. Le monticule gagna encore en altitude, culminant maintenant à une cinquantaine de centimètres, s’affaissant et se disloquant par endroit. Finalement, la chose responsable de ce remue-ménage dû s’impatienter, car elle entreprit de s’extraire plus franchement de sa prison, repoussant sans soin sa couverture de pierre qui s’écroula en gravats tout autour, se dissociant dans sa chute et soulevant un nuage de poussière rougeoyante.
Lentement, une haute silhouette courbée s’éleva à travers le voile de particules en suspension. Elle tira une de ses jambes hors du lit de débris, puis l’autre. Ses muscles grincèrent, ses articulations craquèrent.
Lentement, un géant bossu et blafard apparu au milieu du nuage qui retombait peu à peu, sa peau à l’aspect collant couverte d’une fine pellicule rougeâtre. L’être cligna plusieurs fois des yeux, l’air un peu hagard, et étira ses muscles engourdis avec précaution.
Tout en lui, depuis le voile dans son regard jusqu’à sa manière circonspecte de se mouvoir – en passant par l’inexplicable aura de sagesse et d’ancienneté qui irradiait de sa personne – trahissait son très grand age.
- Bien, bien, bien, souffla l’ancêtre d’une voix de basse puissante bien qu’un peu étouffée, en observant la jungle alentours. Tout cela a bien changé, bien changé. J’ai du dormir longtemps, bien longtemps. Combien de temps, Zigy ? Zigy ?…
Pour toute réponse, un faible sifflement plaintif et électronique émana de la dépression, au cœur du disque qui avait longtemps été son lit. Le vénérable ancien cligna des yeux, et d’un coup de talon maladroit, envoyer bouler à quelques mètres plusieurs morceaux de roche de la taille d’un ballon de football. L’un d’entre eux tournoya un instant, esquiva habilement deux de ces congénères, et traversa le nouveau rideau de poussière qui s’était formé pour venir flotter à quelques centimètres au-dessus de l’épaule de son libérateur. Si c’était possible, on sentait une certaine indignation dans sa manière de glisser dans les airs et de clignoter.
L’engin était d’une simplicité toute géométrique. De profil, il évoquait un croissant de lune de trente-neuf centimètres de hauteur, dardant ses extrémités pointues vers l’avant. De face, on ne distinguait plus qu’une ligne verticale de dix centimètres de largeur, agrémentée d’une plaque en losange en son milieu, comme si ces deux formes élémentaires s’étaient télescopées et encastrées l’une dans l’autre. Ici et là, des lumières circulaires de formes et de couleurs variées clignotaient de manière aléatoire sur la coque d’un blanc inexplicablement déprimant.
- Combien de temps ? répéta l’ancien.
- 16 millions trente-neuf mille six cents quarante années, Noegip, répondit le drone d’un ton neutre dans lequel perçait encore malgré tout un léger reproche.
La manière dont il avait prononcé ce dernier mot laissait deviner un terme honorifique plutôt qu’un nom.
- Impossible ! rétorqua l’autre dédaigneusement, avec un geste agacé qui faillit expédier son interlocuteur de métal au loin.
- Possible, assura ce dernier avec une folle neutralité en réintégrant prudemment sa position. Son vol fluide et adroit s’accompagnait d’un étrange hululement d’oiseau, teinté d’une note électronique difficile à ignorer.
L’ancien leva lentement l’une de ses immenses mains, et se gratta la tête quelques instants, l’air perplexe. Sa chevelure grésilla et commença à luire légèrement.
- Bien, c’est possible, oui, reconnut-il finalement. Mais ça veut dire que nous nous sommes trompés. Ce n’est pas bon signe.
- En effet.
- Nous ne l’avions pas réellement envisagé, je crois bien ? Que nous puissions avoir tort.
- Envisager ce genre de chose n’était pas dans nos habitudes, confirma le drone avec une pointe d’insolence.
- Non, non, c’est vrai, c’est vrai, fit l’autre distraitement, sans paraître s’en apercevoir. Alors… La situation est inédite, n’est-ce pas, Zigy ? Pas de plan de secours, mhm ?
- Si peu.
- Si peu… Bien, c’est mieux que rien, mieux que rien.
Le vieillard s’étira encore, grinçant, gémissant et craquant, déployant son impressionnante personne dans toutes les directions.
Cet être frappait tout d’abord par sa taille. Trois mètres au bas mot, de la plante des pieds au sommet de la bosse, et encore ; cela semblait être nettement en dessous de ses dimensions effectives, car tout son corps était recroquevillé sur lui-même. Les genoux étaient à moitié fléchis, le dos rond, les épaules affaissées, le cou bas et juste assez long pour permettre au sommet du crâne de n’être pas le point culminant de l’ensemble. Et cependant, cette architecture corporelle pour le moins dépourvue de dynamisme ne semblait pas conçue pour se déployer davantage vers le ciel, que ce soit la conséquence d’un génome capricieux ou celle de très, très nombreux siècles d’emprisonnement en position foetale à l’intérieur d’un bloc de pierre.
Une fois l’observateur remit de cette impressionnante constitution, il était frappé par l’aspect à la fois gracile et massif qui se dégageait du personnage. Ses jambes, quoique presque aussi épaisse qu’un torse humain, semblaient rachitiques lorsqu’on contemplait l’immense masse du torse qu’elles supportaient. Un torse aussi large qu’un homme de petite taille, et qui contiendrait facilement un veau de quelques semaines, tant il était bombé sur l’avant et gibbeux sur la face dorsale. Les côtes étaient apparentes, au nombre de sept, et la plus grande avait le diamètre d’un rondin.
Et c’était seulement ensuite que l’on notait pêle-mêle les longs pieds plats aux quatre longs orteils, les deux non moins longs bras aux poignets épais et aux doigts tout aussi longs et fins, les hanches osseuses et proéminentes, la colonne vertébrale dont la silhouette ressortait nettement tout le long du dos, l’épiderme d’un blanc poreux et d’aspect flasque, malgré l’étroitesse avec laquelle il enserrait de toute évidence son propriétaire, la chevelure composée de tentacules entremêlés – et parfois fusionnés – qui se teintaient de mauve à mesure que l’on s’éloignait de leur racine, le front plat, plissé et avancé, le crâne humanoïde d’une dimension presque conventionnelle aux orbites immenses, aux pommettes plus que saillantes et à la mâchoire protubérante et pendante, la bouche sans lèvre aux longues dents plates et noircies, le pâle repli de chair qui lui tenait lieu de truffe tout au bout de la maxillaire supérieure, comme s’il s’était avancé poussé par la curiosité, les joues creuses sur lesquels se chevauchaient de nombreux tendons décolorés, et enfin les grands yeux ronds et noirs dotés de pupilles blanches et brillantes, aux épaisses paupières écailleuses.
- Allons-y, fit l’aïeul d’un ton décidé. Nous avons une tâche à mener à bien.
- Paramètres en cours d’acquisition. Mes circuits statistiques estiment nos chances de survie à cette entreprise à une contre vingt millions trois, Noegip.
- Et alors ? fulmina l’ancien.
- C’était à titre informatif.
- Nous n’abandonnerons pas cette galaxie à la dévastation… dévastation. Nous Senicar n’avons pas coutume de laisser des peuples innocents endurer les conséquences de nos erreurs.
- J’ai en mémoire 7 641 833 occurrences avérées d’une décision de ce type, contredit l’engin d’une voix légère dépourvue d’émotion, s’attirant un regard noir de l’ancêtre. C’est d’ailleurs l’un de ces choix qui a mené à notre situation actuelle.
- Nous agirons, asséna le Noegip d’un ton qui ne souffrait aucune contradiction. Nous ferons tout notre possible pour mener à bien notre mission, aussi désespérée soit-elle, ou je ne m’appelle pas…
Un silence se fit. L’être plissa un peu les yeux. Ses cheveux-tentacules oscillaient doucement dans la brise.
Dans le lointain, un oiseau croassa.
- Eehceel du Haut-Slaât, glissa le croissant de lune volant sur un ton plus neutre encore que lors de ses interventions précédentes.
- Oui, oui, bien sûr, fit le colosse avec agacement. Bien sûr, Eehceel du Haut-Splaât.
- Slaât, rectifia l’ordinateur avec les accents résignés d’un truc qui est programmé à ne tolérer aucune inexactitude quand bien même préfèrerait-il laisser couler.
- Allons-y, répéta le Noegip d’un ton brusque.
- Le calcul des coordonnées est en cours depuis votre réveil, indiqua le drone. La dérive stellaire s’est poursuivie loin au-delà de mes tables de prévision.
- Combien de temps encore ?
- Seize secondes trente-deux centièmes.
- Bien, bien.
Seize secondes et des poussières passèrent, au milieu du bruissement de la végétation et des cris épars de la faune locale.
- Calcul achevé. Coordonnées acquises. Paré au transbordement vers…
- Oui, oui, d’accord, d’accord. En avant.
L’engin émit quelques stridulations offusquées et étouffées s’apparentant sans doute à un marmonnement. Les lumières à sa surface s’organisèrent peu à peu en spirales, et entamèrent une ronde par clignotement, enflant et se contractant. Un grésillement se fit entendre, qui évolua rapidement en un grondement d’une puissance effrayante ; le sol vibra, les petits débris du disque mutilé tressautèrent, des feuilles commencèrent à se détacher des arbres mauves.
Et puis, dans un rugissement de lumière et de vent, un grand tourbillon à trois branches d’un noir d’encre parsemé d’étoiles enveloppa le Noegip et son assistant, avant de s’enrouler brutalement sur lui-même en les emportant avec lui.
Une détonation puissante effraya la faune sur des dizaines de kilomètres, et une onde de choc translucide balaya le sol de l’ancienne clairière désormais repeuplée, maltraitant la végétation et réorganisant subtilement les molécules minérales du sol en dessous. Et puis le calme revint peu à peu, perturbé seulement par les cris affolés des oiseaux et des rongeurs arboricoles.
Dans la masse aveugle de la jungle primitive, un cercle fumant de dix mètres de diamètre – décoré de motifs en spirale définis par des ronds aux dimensions variés – perturbait désormais l’uniforme manteau vert, son centre marqué par la dalle éventrée et l’arbre dépouillé.


A quelques kilomètres de là, une forme se mouvait au sein d’une aspérité torturée qui déformait le terrain de manière atypique. La mousse ici avait eut plus fort à faire, et de grands pans de la structure brillaient encore d’or ou de mauve. Rien ne subsistait, cependant, de ses angles autrefois arrondis et généreux – c’était maintenant le royaume des entailles béantes et acérées, des plaies aux bords déchiquetés, des machineries répandues dans la plaine. Seule l’érosion était venue ici et là adoucir les contours déformés de l’épave.
La forme gravit difficilement un escalier encombré de champignons rampants, et révéla en entrant dans la lumière sa nature Centaurie. L’individu escalada un tronc d’arbre et une console éventrée pour détailler la jungle à travers une large blessure dans la coque de l’ancien palais volant. La forêt encerclait la ruine livrée aux intempéries et à la nature depuis plus de cinq cent ans.
L’inconnu observa le tourbillon d’obscurité rugissante, au loin, qui agitait les feuillages et faisait vibrer le sol. Lorsque retentit la détonation finale, le Centauri sursauta violemment, et porta une main à son cœur droit.
- Oh, miséricorde, gémit-il avec un fort accent alsacien. Qu’ai-je fais ?
Seul un croassement sinistre dans le lointain lui répondit.
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